Accueil          Topos guides            Liens            Album photo

Promenades et Randonnées dans la Cinarca

Promenata è giranduleta in da Cinarca


 

Le hameau de Cruica
Robinson du Cruzzini

Topo guide à imprimer

Un autre regard sur la Corse, son histoire agricole et la désertification rurale

 

A une heure et demie de marche de Lopigna, le hameau de Cruica nous raconte l'histoire de la naissance d'une petite communauté villageoise et de son déclin progressif, vaincue par l'isolement. L'électricité n'arrive toujours pas jusque là, pas plus que le facteur. Construit au milieu du XIX siècle par deux frères qui y firent venir leurs familles, sans doute attirés par la présence de l'eau et de pâturages sur les hauteurs avoisinantes, le hameau compta jusqu'à 7 familles réparties en deux bâtiments. Une école y fût même installée, la salle de classe au rez-de-chaussée, un escalier de meunier menant à l'unique pièce de l'appartement de l'institutrice au dessus. Cette classe fût fermée en 1942 ou 1943. La dernière institutrice de Cruica est revenue en 2007, à 93 ans, faire une visite à son ancienne école, qui occupe une des unités du grand bâtiment où vivaient 6 des 7 familles. Une maison indépendante complétait ce hameau, toujours occupée par le dernier habitant de Cruica, tel un Robinson du Cruzzini, Jeannot, si modeste, si discret mais tellement accueillant avec les visiteurs. Son potager est magnifique et il pratique encore un peu d'élevage. Héroïne de ce hameau isolé d'un fond de vallée Corse, sa mère, une des dernières habitantes de Cruica a reçu la médaille de la famille des mains du Président de la République dans les années 80 et a donc été accueillie au Palais de l'Élysée !


Cruica dominé par la Punta San Eliseo. On distingue encore les terrasses sous le grand bâtiment et les châtaigniers dans les vallons

Sur le cadastre napoléonien relevé l'été 1844 par le "géomètre 2ème classe Souvigné" celui-ci note qu'il existe un "moulin à blé", à proximité du chemin menant à Cruica. Lorsque l'on voit aujourd'hui le maquis à perte de vue, il est difficile d'imaginer qu'il y avait dans cette vallée des champs de céréales, des oliveraies, des jardins, des châtaigneraies et certainement de la vigne sur les plus belles parcelles, le reste servant de pâtures.

 


Après un siècle et demi d'occupation humaine, on distingue encore parfaitement autour du hameau les châtaigneraies dans les vallons, les anciennes oliveraies à l'abandon et les terrasses qu'occupaient les jardins. On peut aussi y voir un four à pain collectif et un séchoir à châtaignes malheureusement à l'abandon, menacé de ruine. 

          

          

Le bâtiment principal de Cruica présente une superbe architecture rustique de montagne du XIXè siècle

Une piste uniquement praticable en 4X4 tout terrain, permet de rejoindre Cruica, mais c'est à pied qu'il faut l'emprunter pour éprouver la dureté et la beauté de ce lieu qui témoigne de ce qu'était l'isolement de la vie rurale avant les routes et l'automobile. Autrefois des chemins, aujourd'hui mangés par le maquis et la forêt, permettaient de rejoindre le col de Vergio et Sari d'Orcino, mais aussi le sommet de San Eliséo, lieu de pâture pour le bétail, ou encore le col de Tartavelle. Du sommet de San Eliséo on pouvait contempler la vallée de la Gravonne, Ajaccio et même la Sardaigne par temps très clair. Mais il fallait au moins 7 à 8 heures de marche pour se rendre à Ajaccio par le col de Vergio et la Bocca di Sarzoggiu. Autant dire qu'aller vendre des fromages ou de la charcuterie au marché d'Ajaccio était une entreprise plus qu'hasardeuse. 

Il y a moins de cinquante ans ces chemins oubliés étaient encore régulièrement pratiqués en dehors des nécessités du travail des champs. Par exemple, l'institutrice de Sari d'Orcino qui avait été nommée à Cruica partait de Sari avec son âne, empruntait le col de Vergio et redescendait sur Cruica pour plusieurs semaines sans revenir chez elle. Chaque 8 octobre la coutume, toujours vivante, du pèlerinage à Santa Réparata, petite chapelle sur les hauteurs de Sari, jetait de bon matin sur ces chemins les habitants de la Cinarca et du Cruzzini qui s'y rendaient en famille. Puissent un jour ces chemins revivre !


 

A l'arrivée ce sont d'abord les cochons qui vous accueillent

puis le chat de Jeannot !

 Topo guide à imprimer